«L’enjeu, c'est aussi de pouvoir réaliser des aménagements de qualité»
René Leutwyler, président de la Société Suisse des Entrepreneurs-section Genève, revient sur les bienfaits de la densification.
Pourquoi la densification est-elle aujourd'hui quasiment une obligation?
En Suisse, la population résidente est en constante augmentation. Les régions à fort potentiel d’emplois seront les premières concernées par la demande en logement. La densification de nos périmètres urbains représente une solution, car construire dans les zones agricoles devient très difficile, voir quasi impossible dans certaines régions. L’alternative serait de pousser les logements en dehors de nos frontières avec comme conséquence directe une pression encore augmentée sur la demande en mobilité.
Quels sont les bienfaits de la densification sur le climat?
D'abord, gagner en efficience énergétique. Densifier initie la réflexion pour la construction de bâtiment de remplacement et des aménagements de qualité sur les périmètres concernés. Nous savons aujourd’hui construire des bâtiments à faible taux d’émissions de CO2 et, surtout, les exploiter avec même zéro émission carbone. En ce sens, moderniser notre parc immobilier devient une nécessité.
Puis, préserver les sols cultivables. Densifier les zones urbaines signifie, pour beaucoup de personnes, vivre près de l’endroit où se situe leur travail, où l’on consomme et où l’on peut vaquer à ses occupations. Il s’agit finalement de construire la ville en ville et ainsi préserver nos terrains agricoles.
Enfin, favoriser une mobilité ajustée. La réduction de nos besoins de déplacements apportera un gain en émission de CO2. Pouvoir concentrer l’habitat dans notre espace de vie, de travail et de nos loisirs de proximité, pourra apporter un bénéfice appréciable.
En quoi le projet PAV est-il exemplaire en ce sens?
Au-delà de l’objectif de densifier les surfaces utiles à nos activités, l’enjeu consiste également à pouvoir réaliser des aménagements de qualité. Les bienfaits de la densification mentionnés ci-avant peuvent se transcrire idéalement dans un périmètre comme celui de «Praille-Acacias-Vernets», du PAV. Il est très intéressant de pouvoir concrétiser une réflexion de densification des surfaces utiles des bâtiments tout en y intégrant les équipements et les espaces publics adaptés ainsi que des zones de verdure généreuses.
Quels sont les défis que pose la densification pour les entrepreneurs de la construction?
Le but est d’associer l’acte de construire avec les objectifs de réduction massive d’émission de CO2. In fine, l’objectif est d’atteindre une neutralité en émission carbone. Nous avons déjà la technologie ainsi que le savoir-faire à ce sujet. Les défis résident dans l’industrialisation de nos procédés de production et dans le fait de pouvoir les appliquer de manière systématique avec des chaines d’approvisionnement établies.
Comment y répondent-ils?
En intégrant des matériaux de construction adaptés et en appliquant les principes de l’économie circulaire. Pour faire du béton, par exemple, il faut du ciment et des granulats. La fabrication des nouveaux types de ciment émet déjà moins de CO2, ce qui est une très bonne chose. Par ailleurs, il existe un réel potentiel découlant de la réutilisation des matériaux de démolition qui peuvent être recyclés en granulats. A l’heure actuelle, la branche recycle d’ailleurs déjà plus de 70% des déchets d’excavation et de démolition.
Est-il possible, selon vous, de densifier à l'infini?
Dans la réflexion de la densification, il s’agit avant tout d’un processus d’optimisation sur un périmètre. Densifier à l’infini, pour autant que cela soit possible, n’est donc pas vraiment l’objectif. Ceci dit, les métiers de la construction ont beaucoup d’éléments en mains pour construire en préservant le climat. En densifiant nos zones d’habitations nous progressons certainement sur un des chemins à suivre pour atteindre nos objectifs climatiques de 2030 et 2050.